Le plaisir dans la contrainte consentie : avec le bondage, rajouter du lien dans sa sexualité

Tradition millénaire au Japon, le bondage, ou shibari, attire de plus en plus d’adeptes en Europe. La pratique, qui consiste à attacher son ou sa partenaire lors de relations érotiques ou sexuelles, peut amener vers des plaisirs intenses.

Sur le tatamis, imaginez des centaines de cordes … Larges, fines, beiges, rouges et vertes. Ici on est pourtant bien loin d’être sur un bateau. Imaginez encore au mur, des grands tapis japonais et plusieurs photos en noir et blanc de femmes nues avec des cordes tout autour de leur corps … Dans ce petit appartement parisien, on pratique le bondage, tradition millénaire au Japon, qu'on appelle là-bas Kinbaku ou Shibari. C’est une pratique sadomasochiste qui consiste à attacher son ou sa partenaire pendant des relations érotiques ou sexuelles.

Une pratique taboue

En Europe, la pratique est longtemps restée cachée et considérée comme tabou, mais aujourd'hui elle attire de plus en plus de curieux comme Adrien et Camille. “C’est arrivé dans nos envies comme ça, dans notre imagination. On en a parlé avec des potes et on avait dit que ce serait bien", annonce Camille. "Tu aimais un peu la contrainte, je me suis dit que tu aimerais bien, répond son conjoint. C’était son cadeau de Noël”.

Le cadeau, c’est un cours avec Seb Kinkabu pour apprendre les bases du bondage. Chez lui, on se croirait à Tokyo. Au Japon, il existe même des clubs dédiés à la pratique. “Là-bas, le shibari n’est pas apparenté au sexe, le shibari c’est du sexe”, explique l'instructeur.

Le couple de trentenaire vient justement découvrir de nouveaux plaisirs. L’un fait les noeuds et l’autre est noué. Pour eux, c’est Adrien qui tiendra la corde. Les deux partenaires vont ressentir des sensations de plaisir. “Le shibari ça ne va pas créer de plaisir sexuel proprement dit, ça va mettre dans une certaine condition, poursuit Seb Kinkabu. Côté encordé, y’a une sensation de lâcher prise qui est très intense, souvent recherché par des personnes qui ont de la pression au quotidien et aussi sensation de retrouver son corps. Côté encordeur, il y a beaucoup d’émotions, créée avec principalement de la gratification car la personne nous accorde toute la responsabilité et c’est enivrant”.

Un encadrement strict

L’homme et la femme peuvent jouer les deux rôles. Mais mais avant et pendant, il y a des règles à respecter. “On va pouvoir passer des cordes quasiment partout, souligne l'enseignant. Les parties non articulaires et les parties rigides du corps donc en général peuvent être attachées, mais la consigne de sécurité, c'est de ne pas passer de cordes sur l’intérieur et l’extérieur des articulations, cou inclus".Les parties génitales, et les extrémités, pieds, main et le visage sont aussi exclues de la contraintes : "on va y passer des cordes de jeu donc sans tension”.

Contraindre et nouer, oui, mais pas question d’oublier le consentement. “Au Japon, ils disent que la corde ne ment pas, c’est à dire que si on fait une session de shibari et qu’un des deux n’était pas prêt, ça va se ressentir”, estime Seb Kinkabu.

En tout cas, après avoir passé deux heures à apprendre différentes techniques, Adrien a le sourire. Il envisage la pratique très différemment. “Ca peut même être un acte en soi au final : pas forcément besoin d'un acte sexuel en plus après cela. C'est une pratique qui peut se suffire à elle-même”, confie le jeune homme.

Mais pour Seb Kinbaku, le plaisir passe d’abord par la patience. “Beaucoup de gens qui commencent le shibari veulent tout de suite arriver à des niveaux esthétiques importants. Pour la personne qui se fait encorder, la pratique devient stérile. On a l’impression de se faire attacher pour arriver à quelque chose d’esthétique et pas à un moment à vivre”.

Contraintes

Selon un sondage réalisé du site de ventes d’accessoires intimes LELO, 76% des gens ont déjà essayé au moins une fois le bondage. Mais pour l’instructeur, il faudrait en fait l’intégrer dans sa vie sexuelle au quotidien pour l’apprécier à sa juste valeur. “C’est une pratique qui demande de la régularité, on ne peut pas faire des techniques de shibari qu’une fois par semaine ou une fois par mois sinon on revient à 0."

Pour ça il faut connaître les différentes techniques. Car des cordes ou liens mal placés peuvent générer des lésions irréversibles voire étouffer. Camille et Adrien promettent d’être prudents dans leur pratique. Alors qu'ils quittent l'appartement pariso-tokyoïte, l'instructeur les encourage. “Eh bien parfait, maintenant qu’on a appris toutes les bases, vous n’avez plus qu’à vous amuser avec les cordes. Amusez-vous en faisant un minimum de technique. Amusez-vous !”

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